Le matin du 17 mai 2023, des femmes musulmanes viennent une à une des différentes provinces du Burundi, se réunissant pour un rendez-vous qu’elles attendaient beaucoup comme certaines d’entre elles le disent. En effet, elles répondent à l’invitation de l’association des femmes musulmanes du Burundi (AFEMUBU) en partenariat avec le Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA), pour une séance d’échanges autour des nouvelles technologies de l’information et de la communication (TIC). Comment utiliser les TIC pour une meilleure autonomisation de la femme musulmane ? Comment ces femmes pourraient également utiliser les TIC dans la lutte contre les violences basées sur le genre (VBG) et la promotion de la planification familiale ? C’est autour de ces questions là que leurs échanges ont tourné pendant la journée de ce mercredi à Bujumbura à cette session dont le thème était : « La femme musulmane burundaise face aux nouvelles technologies de l’information et de la communication ».
« La femme musulmane ne doit pas rester derrière, elle doit aussi utiliser les opportunités que les nouvelles TIC lui offrent dans chaque domaine de sa vie », indique Hadjat Appoline Niragira, Présidente de l’AFEMUBU. Au délégué du Représentant de l’UNFPA Burundi, Dr Kacou Pierre Konan d’ajouter que l’UNFPA sera, dans la mesure du possible, toujours engager à encourager, à s’associer et à soutenir toute institution, quelle que soit sa nature dont les initiatives sont orientées vers l’atteinte des trois résultats transformateurs qui sont : Zéro décès maternel évitable, Zéro besoin non satisfait en Planification Familiale et Zéro Violence Basée sur le Genre.
La lutte contre les violences basées sur le genre grâce aux TIC a été l’un des exposés que les femmes musulmanes ont suivis. En effet, pour UNFPA, les nouvelles technologies de l'information et de la communication offrent une infinité de possibilités. Il a été compris que dans notre monde de plus en plus connecté, il est indispensable que chacun y compris ces femmes musulmanes ait accès au numérique et développe des connaissances et compétences afin de travailler, se former ou encore participer à la vie citoyenne. Néanmoins, certains abusent de plus en plus de ces technologies, s’en servent comme arme et ciblent les femmes et les filles de manière disproportionnée. Les violences et les discriminations perpétuent l’exclusion des femmes et des filles du monde des technologies contrairement à ce qui est dit que la fracture numérique s’explique par le manque d’intérêt des femmes et des filles pour les nouvelles technologies ce qui réduit leurs possibilités et renforce les inégalités économiques, sociales et de genre. En outre, Les femmes musulmanes présentes à cette séance d’échange ont compris que ces mêmes TIC pourront être utile à la prévention des violences basées sur le genre qu’elles peuvent connaitre ou dont elles peuvent être témoin dans la communauté.
Après la séance sur la lutte contre les violences basées sur le genre, les femmes musulmanes ont eu droit à la présentation sur l’importance de la planification familiale non seulement pour le ménage mais aussi pour une bonne santé et autonomisation concrète de la femme. « La femme peut-elle être capable d’être en bonne santé et financièrement autonome afin de contribuer à l’épanouissement de sa famille quand elle est non seulement enceinte mais a aussi un enfant au dos, deux autres soulevés par ses deux bras, avec un autre qui tient le bout de sa robe tout en portant sur la tête son panier pour le commerce ? Si oui, jusqu’à quand va-t-elle en être capable ? » Une question qui a suscité un long rire de ces femmes mais aussi des échanges intéressants entre elles autour de la Planification Familiale. A une participante de partager :
« J’ai 4 enfants, l’ainé est né en 1985 et le dernier en 1996. Le plus court espacement de ces grossesses était de 3 ans, sinon le reste c’était 4 ans. Vous comprenez qu’entre 2 naissances je pouvais vaquer à d’autres occupations et m’occuper aussi de ma famille. Aujourd’hui nous sommes en 2023, la vie est encore plus chère et plus difficile, la femme dont on vient de faire l’image, qui porte des enfants partout et aussi enceinte, ira-t-elle plus loin »? Dans la salle on entend le brouhaha des femmes et des chuchotements acquiesçant que c’est vrai que la planification familiale est nécessaire non seulement pour préserver la santé de la femme mais aussi pour qu'elle puisse vaquer à d’autres occupations lui permettant de s’épanouir de manière sociale et économique. Cependant, il y’en a qui n’étaient pas si d’accord que cela, comme cette autre participante qui s’exprime :
« Vous pouvez utiliser toutes ces méthodes, si Allah veut que vous soyiez enceinte et bien vous le serez. On n’a pas besoin de ces méthodes contraceptives, elles ne peuvent pas arrêter la volonté d’Allah de te donner des enfants. J’ai eu mon premier enfant à 18 ans, aujourd’hui j’en ai 7 et des accouchements très rapprochés, mais comment voudriez-vous que je m’y oppose si Allah me les donne ainsi ? C'est sa volonté ». A certaines autres de répondre que oui Dieu donne les enfants mais Il donne aussi la capacité d’utiliser le bon sens et l’intelligence car aucune mère au monde ne voudrait voir ses enfants mourir de faim, de maladie non soignée à cause de la pauvreté ou en train d’errer dans la rue parce que les parents n’ont pas pu prendre soin d’eux. D’où des échanges ont continué à tourner autour de la parenté responsable et de partage d’expérience sur la planification familiale.
Il est à noter qu’à cette séance d’échanges, ces femmes musulmanes regroupées dans l’association des femmes musulmanes du Burundi n’étaient pas seules. Elles ont été soutenues par la Communauté Islamique du Burundi (COMIBU) qui était représentée dans cette activité par Protais Asmani Ndagijimana, Représentant Adjoint de la COMIBU. Il a par ailleurs eu l’occasion de faire un exposé sur l’importance des nouvelles TIC pour l’autonomisation de la femme musulmane. Ce qui a été suivi par un autre exposé sur l’E-Commerce grâce aux TIC. Des discussions intéressantes et échanges d’expériences ont suivi ces différents exposés partagés durant toute la journée, ce qui a motivé ces femmes musulmanes à prendre un engagement personnel d’utiliser cette opportunité autour des TIC car comme disaient certaines, elles pensaient que c’était pour les jeunes ou alors que ces nouvelles technologies ne pouvaient que leur être nuisible.
Par Queen Belle Monique Nyeniteka